Voulez-vous faire couvrir un événement par Togo Matin?

Immixtion dans la vie politique togolaise/ Monseigneur Philippe Fanoko Kpodzro n’est-il pas fatigué ?

Mgr Philippe Fanoko Kpodzro

Son intervention dans la vie politique togolaise ne date pas d’aujourd’hui. Monseigneur Kpodzro est bien connu des Togolais, surtout par la génération qui a vécu l’époque de la conférence nationale souveraine et les événements qui ont suivi. C’est donc un habitué de la scène politique. Mais il faut reconnaître que ses agissements ne sont pas toujours appréciés de la même façon dans tous les camps. Alors qu’il avoisine sa 90e année de vie, n’est-il pas temps pour ce patriarche de prendre sa retraite ?

Après le soulèvement populaire du 5 octobre 1990 qui a conduit le général Gnassingbé Eyadema à concéder l’organisation d’une conférence nationale souveraine à l’instar d’autres pays comme le Bénin, monseigneur Kpodzro alors archevêque de Lomé a eu le privilège de la présider. Cette tâche exigeait de sa part une certaine hauteur d’esprit. Malheureusement, selon les témoins de l’époque, les choses lui ont rapidement échappé. Ou plutôt, il est tombé dans le jeu des populistes.

La conférence nationale qui n’a pas eu les mêmes succès que dans un pays comme le Bénin a toutefois abouti à une transition. Monseigneur Kpodzro prendra alors la tête du Haut conseil de la République (HCR) qui faisait office de Parlement. Leurs travaux se sont arrêtés selon les témoignages, lorsque sous sa direction, les membres du HCR ont décidé de dissoudre le Rassemblement du peuple togolais (RPT). Une grave erreur selon plusieurs analystes. En effet, les pays dans lesquels la transition du parti Etats vers le multipartisme et la démocratie s’est déroulée sans heurts, l’on a évité de faire des exclusions ou des règlements de compte. C’est donc depuis cette bourde, que la transition a pris un coup qui lui sera fatal selon les témoins de l’époque dont Nicolas Lawson, le président du Parti du renouveau et de la rédemption (PRR).

Le come-back

Monseigneur Kpodzro n’était plus vraiment intervenu dans les affaires politiques du Togo depuis l’échec de la transition politique. Mais à la faveur de la crise politique du 19 août, il a fait son come-back. L’on dirait que depuis plus de 20 ans, le vieux curé était en hibernation et qu’il a fallu l’avènement d’un certain Tikpi Atchadam, président du Parti national panafricain (PNP) pour lui rappeler qu’il avait une mission à terminer. Il s’aligne aussitôt sur les revendications de la Coalition des 14. Alors, conférence de presse après conférence de presse, il ne cesse de demander à Faure Gnassingbé de ne plus se représenter en 2020. Malgré son soutien, l’opposition togolaise n’est pas parvenue à ses fins et a été battue successivement lors des trois élections que notre pays vient de connaître.
Entre-temps, l’Assemblée nationale saisissant l’occasion d’un projet de réforme envoyé par le gouvernement, a définitivement clos ce chapitre afin de permettre au Togo de tourner la page des crises politiques à répétition. Et ce fut un succès retentissant. Faure Gnassingbé, fort de ce renouveau se représente et obtient à la grande déception de ses adversaires, la confiance d’une majorité écrasante de la population togolaise.

Une vengeance qui ne dit pas son nom ?

A travers le chef de l’Etat Faure Gnassingbé, monseigneur Kpodzro voit sans doute feu général Eyadema, le père de ce dernier qu’il a eu à combattre dans les années 1990. Ce dernier avait en effet pris des dispositions pour mettre fin au désordre qui s’était installé dans la cité. Monseigneur Kpodzro, à l’exemple de plusieurs autres extrémistes de l’époque n’a jamais digéré cela. Alors aujourd’hui, il revient sans doute pour terminer ce qu’il avait commencé. Il en fait visiblement une affaire personnelle.

D’ailleurs lors de ses sorties, il affirme vouloir assister à l’alternance avant de mourir. Est-il vraiment guidé par l’intérêt supérieur du peuple togolais ? Alors pourquoi en tant qu’homme de Dieu prendre résolument position pour un bord contre un autre au risque même d’entraîner des conflits ? Récemment, après la défaite de son poulain à l’élection présidentielle de 2020, le prélat affirme qu’il sera « le pire cauchemar de Faure Gnassingbé ». Cela fait sourire. L’on a l’impression d’entendre un acteur politique parler. L’on dirait même que c’est lui le candidat malheureux. Lors de la campagne électorale, il s’est illustré encore de façon rocambolesque en volant même la vedette à son candidat.

Agbéyomé Kodjo devrait d’ailleurs s’en méfier. Qui sait si monseigneur Kpodzro ne voudrait pas carrément se positionner sur la scène politique ? L’honorable Abass Kaboua, le leader du Mouvement des républicains centristes (MRC) avec l’humour qu’on lui connaît, lui demande de se présenter en 2025. Au moins, il aura la chance de devenir chef de file de l’opposition. Mais franchement, pour être sérieux, il est temps pour le vieux prélat d’arrêter de s’illustrer de façon aussi pitoyable aux yeux des Togolais. Vivement que son entourage lui en souffle un mot.